Développement du langage – des jalons pour se repérer

Les premiers mots d’un enfant suscitent toujours beaucoup de réactions. Quoi de plus magique que d’entendre un tout-petit s’exprimer, puis s’exprimer de mieux en mieux, et d’être finalement capable de communiquer complètement ?

Pourtant, tout n’est pas toujours si facile – le développement du langage, parce qu’il est visible et quantifiable, cristallise beaucoup d’anxiété. Quel est le développement classique du langage ? Quoi faire pour aider son enfant à développer le langage ? Quand faut-il s’inquiéter ? Décryptage avec Stéphanie Moryoussef*, orthophoniste et experte Edumiam (co-auteure de notre formation Langage).  

Le développement du langage expressif

Le développement du langage se fait très progressivement en fonction du développement du cerveau du tout-petit. Le rythme de chaque enfant lui est propre. Loin de nous, donc, l’idée de chercher à tout normer (ce qui est souvent anxiogène par ailleurs).

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Pour autant, se référer à un repère assez général permet à la fois aux professionnelles de la petite enfance et aux parents de se rassurer quant à l’évolution respectivement des tout-petits qu’ils accueillent ou de leurs enfants.

En termes de repères, Stéphanie Moryoussef considère qu’il y a cinq grandes étapes dans le développement du langage :

  • De 3 à 6 mois, le bébé produit ses premières vocalisations.

  • Entre 9 et 12 mois, il arrive à l’étape du babillage canonique, autrement dit la duplication de petites syllabes.

  • Entre 12 mois et 15 mois, le moment est venu pour le tout-petit de prononcer ses premiers mots.

  • Autour de 2 ans, l’enfant peut prononcer environ 50 mots et procède à des associations de mots (la prononciation, à ce stade, n’importe pas et il est capital de la dissocier du vocabulaire acquis).

  • Autour de 3 ans, l’enfant commence à construire de courtes phrases avec un sujet, un verbe et un complément. Des éléments syntaxiques apparaissent et il utilise le « je ».

Ces étapes correspondent au développement du langage chez la grande majorité des enfants.

Il arrive cependant qu’un enfant soit un peu en retard ou ne soit pas en mesure, à l’âge donné, de s’exprimer aussi bien qu’on le souhaiterait. Stéphanie Moryoussef considère que la manière dont l’enfant parle à deux ans est un signe d’appel. Le manque de mots à cet âge ou l’impossibilité pour un enfant de communiquer doit alerter les parents ou les pros de la petite enfance sur un possible retard de développement. 

Le développement de la compréhension du langage

Stéphanie Moryoussef recommande toutefois de ne pas se focaliser uniquement sur le versant expressif du langage. Dans le cerveau, le langage se développe en même temps que la compréhension. Un enfant qui aurait des retards dans la production du langage mais aucun en termes de communication non verbale ne doit pas susciter les mêmes questions qu’un enfant incapable de comprendre ce qu’on lui dit ni de transmettre un message non oral.

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Elle donne, pour faire la part des choses, de nouveaux points de repères concernant les étapes de développement de la compréhension :

  • De 3 à 6 mois, le bébé regarde l’adulte dans les yeux, sourit, commence à réagir à son prénom.

  • De 9 à 12 mois, le tout-petit pointe du doigt ou fait des signes permettant de se faire comprendre (non avec la tête, début de la langue des signes éventuellement). Il comprend des mots familiers.

  • Entre 12 et 16 mois, l’enfant comprend de petites phrases simples (« papa est parti »).

  • Vers 2 ans, le jeune enfant comprend des consignes décontextualisées (par exemple « Va me chercher une cuillère dans la cuisine s’il te plaît » alors qu’il est en train de dessiner) et de plus en plus complexes.

  • Vers 3 ans, l’enfant peut comprendre des éléments syntaxiques (spatiaux, temporels) et la variation des temps (présent, passé, futur).

Si le retard de langage et le retard de compréhension et/ou de communication sont concomitants, alors il est important de se poser des questions sur le développement de l’enfant.  


Que faire pour aider le jeune enfant à développer ses compétences langagières ?

Une formule magique ?

La formule magique n’a rien de très compliqué : pour qu’un enfant s’exprime le mieux possible, il est important de lui parler beaucoup, de mimer certaines choses, d’articuler, de prêter attention à ce qu’il dit et à l’évolution de son langage, de remarquer chacun de ses progrès, de le féliciter, de l’encourager et de reformuler ce qu’il dit pour lui faire entendre des phrases correctes.

Et si je ne comprends pas ?

Si l’on ne comprend pas, on tente de reformuler ce que l’on a compris en y ajoutant une question fermée : « Tu veux jouer avec ta voiture, c’est bien cela ? ». Même lorsque la compréhension est difficile, montrer que l’on a de l’intérêt pour ce que dit l’enfant lui évite de se décourager, de se renfermer ou d’être frustré. Faire répéter pour améliorer la prononciation d’un mot que l’on a compris n’est pas recommandé car cela coupe la communication.

Lorsqu’un enfant ne communique pas du tout, il faut essayer de favoriser les interactions lors de moments de plaisir, lorsqu’il fait quelque chose qu’il aime. C’est une bonne porte d’entrée dans la communication. Ainsi, les échanges verbaux sont associés à quelque chose de plaisant.

Quand ?

Lorsque l’enfant fait une tentative de communication – lorsqu’il est prêt, donc. 

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Des outils ?

Le livre joue un rôle capital dans le développement du langage – par la lecture, qui permet au jeune enfant d’enrichir son vocabulaire, mais aussi d’être acteur de la communication. Laisser parfois l’enfant (qui le désire) raconter l’histoire lui donne le sentiment d’être important.

Parmi les outils à éviter : les écrans. Un enfant, face à un écran, n’est pas acteur de la communication et peut aller jusqu’à s’en désintéresser. Mieux vaut privilégier les interactions sociales, à la fois par la richesse de vocabulaire qu’elles apportent et parce qu’elles illustrent les possibles de la communication.


Et si tout ne semble pas se passer normalement…

Lorsque tous les efforts de communication n’ont aucune conséquence sur le développement du langage chez le jeune enfant et que les retards constatés au niveau du langage sont également présents au niveau de la compréhension, force est de constater qu’il faut intervenir pour aider l’enfant. Plus on intervient tôt, plus il sera facile de combler un éventuel retard et d’éviter le développement de troubles du comportement liés à la frustration et au découragement de ne pas pouvoir exprimer ses besoins.

Vers qui se tourner ? Les orthophonistes sont aujourd’hui très sollicités. Il est donc recommandé de contacter d’abord son médecin traitant ou se rendre sur le site de la FNO (fédération nationale des orthophonistes) ou encore sur Allo Ortho, un site qui pourra répondre à vos questions.

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*Qui est Stéphanie Mouryoussef ? Stéphanie est orthophoniste depuis 16 ans. Elle exerce en libéral à Paris ainsi qu'en CAMSP (Centre d'action médico-sociale précoce). Elle est spécialisée dans la prise en soin du jeune enfant présentant des troubles du langage oral (troubles du spectre de l'autisme et troubles neuro-développementaux).